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joffrine donnadieu
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«Je veux respirer sur scène, entendre les trois coups chaque soir, commettre des crimes, des infanticides, des adultères, aimer éperdument, haïr follement, voyager à travers les époques, changer de sexe, m'empoisonner, mourir, renaître.» Romy, vingt ans, arrive à Paris avec le rêve d'être comédienne. Pour subsister et payer le Cours Florent, elle travaille dans un club de strip-tease à Pigalle. Odette, vieille fille de quatre-vingt-neuf ans, la loge contre un loyer modique et un peu de compagnie. String à paillettes et crucifix devront faire bon ménage. Deux femmes s'apprivoisent, entre chien et loup. Elles nouent une relation faite de fascination et de dépendance, se renvoyant en miroir leurs corps meurtris, leurs solitudes, leurs folies, leurs enfances volées et surtout leur désir de vivre. Dans cette emprise mutuelle, jusqu'où seront-elles capables d'aller ? On retrouve ici la puissance viscérale de l'écriture de Joffrine Donnadieu, qui décrit avec acuité la violence des rapports sociaux, l'apprentissage du théâtre, la vie des corps.
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«Je m'efforçais de mettre mes pieds où elle avait mis les siens et cela m'obligeait à faire de grands pas pénibles. Parfois mes bottes trop grandes collaient à la boue. J'arrachais mon pied de la botte, la botte à la boue, je la remettais. J'essayais de la rattraper. Elle allait loin devant avec la lampe, et moi j'étais dans le noir à patauger.» La narratrice, Marie, jeune bâtarde, parle de sa mère. Sa mère, c'est Génie la folle, cette fille de bonne famille qui, déshonorée, s'est faite domestique agricole. Sa mère, c'est ce mutisme terrible qui encaisse la rudesse d'une vie rurale semée de secrets. Collée à une ombre, Marie suit et attend, sans cesse, dans la crainte d'être abandonnée. Dans un style poétique désarmant et naïf, avec la pudeur de ceux qui ont trop souffert, la jeune Marie évoque avec
ses yeux d'enfant le froid monde du dehors. Résiliente, portée par un amour immense, elle transforme la boue en beau. Poignant tableau dans lequel coexistent la bassesse de l'âme et la plus grande pureté, le roman d'Inès Cagnati est une déflagration. -
Toul, 1999. À neuf ans, Romy est abusée pour la première fois par France, une voisine. Son enfance soudain se déchire comme une robe de princesse. Romy entre en guerre. De neuf à dix-neuf ans, nous la voyons se battre contre le chaos qui grandit, contre l'attachement invivable qu'elle ressent pour France, contre un ordre social dont elle ne comprend pas les règles, contre ce corps féminin qui va devenir son principal ennemi. La romancière s'attache à peindre, avec un sens exceptionnel de l'observation, un milieu social et géographique que la littérature fréquente rarement : tous les personnages sont des militaires de la base de Toul, des ouvriers de chez Kleber, des zonards du canal, toujours décrits avec une empathie discrète. Un premier roman implacable, radical.
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Revue L'Avant-scène théâtre : La nuit : neuf pièces courtes
Chloé Mons, Aliyeh Ataei, Claire Chazal, Adeline Dieudonné, Joffrine Donnadieu, Eva Ionesco, Maria Larrea
- Avant scène théâtre
- Revue L'Avant-Scène Théâtre
- 12 Janvier 2024
- 9782749816234
Pour la douzième édition du Festival Paris des femmes, neuf autrices contemporaines ont composé des textes sur le thème de la nuit. La nuit : propice aux révélations. Aux introspections et à l'étonnement. Aux confessions et à toutes les folies. La nuit est un espace de liberté aussi captivant que vertigineux, et ces neuf artistes du monde des lettres, du cinéma, du théâtre et de la chanson, s'en sont emparées avec fougue et brio. Il y a l'Afghanistan, une chambre d'hôtel, un studio d'enregistrement, un salon familial ; il y a une hôtesse de l'air, une assistante médicale et des adultes aux âmes d'enfants meurtries ; il y a des femmes seules, en couple, bien ou mal accompagnées... Ces pièces courtes entraînent lecteurs et spectateurs dans des univers multiples, peuplés d'ombres et de lumières. Comme la nuit. Comme la vie. Textes de Aliyeh Ataei, Claire Chazal, Adeline Dieudonné, Joffrine Donnadieu, Eva Ionesco, Maria Larrea, Chloé Mons, Aurélie Saada et Colombe Schneck. Ouverture-préface d'Axelle Jah Njiké.
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«Son ventre est chaud, il brûle. Il ne reste plus que cette boule incandescente au niveau du nombril qui illumine tout sur son passage. Jamais elle n'a ressenti autant d'amour. Son ventre contient leur histoire. Elle flotte dans l'air comme un foulard emporté par le vent. Elle passe à travers la grille, y dépose la fourrure des souvenirs qui l'étouffaient, les secrets enfouis, sa vie faussée. Elle dépose les angoisses, les peurs, le dégoût d'elle-même, l'effroi, la culpabilité, les mensonges et les sombres nuits.» À trente-quatre ans, Marguerite, dite Marge, fuit la moindre entrave à sa liberté. Sans emploi ni logement stables, elle est envahie par des personnages qui peuplent ses nuits, chacun réclamant qu'elle raconte son histoire. Elle finit par trouver refuge dans la cabane d'un chantier abandonné, rue des Martyrs. En escaladant l'échafaudage de l'immeuble vide, elle découvre un dernier occupant : Victor, ancien militaire, qui résiste aux pressions du promoteur immobilier. Ensemble, ils vont faire alliance contre le monde extérieur. Alors que chaque nuit Marge met au monde les créatures qui la hantent et lui dévoilent un lourd secret d'enfance, la passion amoureuse va saisir les deux réfractaires aux destins si opposés. Ce roman plein de fougue emporte le lecteur dans l'histoire d'un amour ardent, nourri par la puissance de l'imaginaire. Joffrine Donnadieu libère ici une langue charnelle, vibrante, habitée.